Un peu d'histoire...

D'où vient le mot « Hainaut » ?

 L'appellation « Hainaut », issue du mot germanique « Hagino » : dérivé de « Hago », le bois.

Il donnera « Haine » en français et fait référence à la rivière éponyme qui a longtemps servi de trait d'union entre les bassins de la Meuse et de l'Escaut, contribuant, dès le Moyen Age, à l'essor économique de la région, grâce, notamment, au transport de la houille.

 Bien avant cela, à l'ère néolithique, des hommes s'étaient établis dans la vallée de la Haine, entre Obourg et Spiennes, pour y exploiter le silex et donner ainsi naissance à la première industrie de l'Histoire.

L'époque romaine

 Lorsqu'il entreprend la conquête de la Gaule Belgique, en 57 av. J.C., Jules Cesar se heurte aux Nerviens, qui contrôlent une vaste zone s'étendant d'Anvers à Cambrai.

 Défaits à la bataille du Sabis (une rivière qui pourrait être la Sambre), ceux-ci sont intégrés dans l'Empire romain mais conservent une parcelle d'autonomie au sein de la « Cité des Nerviens » : une circonscription administrative créée sous l'Empereur Auguste et dont le chef-lieu est Bavay.

C'est sur la base de ce découpage territorial que seront fondés, au IVe siècle, les diocèses de Cambrai (qui supplante Bavay), et de Tournai, situé sur la rive gauche de l'Escaut, en pays Ménapien.

Les invasions germaniques

 Les Francs s'emparent de la Gaule septentrionale et installent leur capitale à Tournai. De nouvelles subdivisions territoriales apparaissent.

Le Diocèse de Cambrai est scindé en plusieurs « pays », qui se transformeront plus tard en comtés.

Le pagus de Famars (un ancien oppidum romain situé à proximité de Valenciennes) regroupe une partie des territoires du Hainaut belge et français. Cette appellation sera progressivement supplantée par le terme « Haynau », un changement qui reflète le déplacement du centre de gravité du territoire en direction de la Haine.

 A la fin du VIIème siècle, Waudru, fille de Walbert, Gouverneur du Hainaut sous Dagobert Ier, fonde sur une colline, au confluent de la Trouille et de la Haine, un oratoire autour duquel s'érigera la ville de Mons, future capitale des Comtes de Hainaut.

Les comtes de Hainaut

 A la mort de Charlemagne, l'Empire franc, qui s'étend du Danube aux Pyrénées, ne tarde pas à se désagréger. Les seigneurs locaux mettent à profit cette longue période d'instabilité pour affermir leur pouvoir féodal et tenter d'agrandir leurs domaines.

Au fil des querelles, le Comté de Hainaut parvient à grignoter de nouveaux territoires au nord (Chièvres, Braine-le-Comte, Halles) et au sud (Beaumont, Chimay) au détriment de la Flandre, du Brabant et du Namurois. Les frontières qui se mettent en place à la fin du XIème siècle subsistent quasi jusqu'à la Révolution française.

 Mais les Comtes de Hainaut ont d'autres ambitions. En 1160, Baudouin V épouse la fille de son puissant voisin, le Comte de Flandre, auquel il succède, réalisant ainsi l'union des deux territoires. Son fils Baudouin VI se fera même sacrer Empereur romain d'Orient à Constantinople, à la faveur de la quatrième croisade. Après sa mort, la Flandre et le Hainaut prendront à nouveau des chemins distincts. Un siècle plus tard, le Comte Jean d'Avesnes se fait reconnaître héritier du Comté de Hollande.

 Cette montée en puissance ne se fait pas sans heurts ni revers. Coincé entre le Royaume de France et l'Empire romain germanique, le territoire hainuyer, avec ses campagnes fertiles et ses nombreux centres urbains, est l'objet de toutes les convoitises. Il devient rapidement le champs de bataille des rivalités entre grandes puissances, y compris de l'Angleterre.

La domination bourguignonne

 En 1427, Philippe le Bon, qui a hérité de son père le Comté de Flandre, se voit confier le gouvernement du Hainaut. Il prête le serment officiel dans la collégiale Sainte-Waudru, à Mons. La politique de mariages, d'alliances et de successions menée par les Ducs de Bourgogne va leur permettre d'asseoir progressivement leur souveraineté sur une vaste mosaïque de territoires (Hainaut-Hollande, Brabant, Limbourg, Namur, Luxembourg,...). Seuls la Principauté de Liège avec des enclaves à Thuin et à Châtelet, ainsi que le Tournaisis, échappent encore à cette ensemble.

 La domination bourguignonne est généralement considérée comme une période florissante pour l'agriculture, le commerce et l'industrie. C'est également à cette époque que se mettent en place les Etats provinciaux, sortes d'assemblées régionales réunissant des représentants de la noblesse, du clergé et des bonnes villes, à travers lesquels les Ducs maintiennent une forme de décentralisation.

 Si la mort de Charles le Téméraire au siège de Nancy en 1477 sonne le glas des ambitions bourguignonnes, le mariage de sa fille, Marie, avec l'Archiduc Maximilien d'Autriche, annonce un changement majeur sur la carte de l'Europe, avec l'émergence de la dynastie des Habsbourg et la constitution d'un Empire sans précédent dont la puissance culminera sous le règne de Charles Quint. Lors de son abdication, sa succession est partagée entre son frère Ferdinand, qui reçoit les possessions germaniques, et son fils Philippe, qui hérite du trône d'Espagne et des Pays-Bas.

Les Guerres...

 Au début du XVIIe siècle, la Guerre de Trente ans implique la plupart des puissances de l'époque induit des conséquences importantes sur le plan géopolitique : les provinces protestantes du Nord des Pays-Bas, qui avaient fait session en 1581, acquièrent définitivement leur indépendance et forment les Provinces-Unies. Le sud, à majorité catholique, reste sous domination espagnole jusqu'à son transfert à la maison d'Autriche, en 1713, suite à la Guerre de Succession d'Espagne. Entretemps, le Hainaut historique est amputé d'une partie de son territoire (Avesnes, Maubeuge, Valenciennes), cédé à la France.

... et les révolutions

 La Révolution de 1789 entraîne, dès 1795, l'annexion par la République française des neufs provinces belges, qu'elle transforme en départements. Le Hainaut est renommé Département de Jemappes, en mémoire de la bataille qui s'y est déroulée en 1792. Un nouveau remodelage territorial s'ensuit, à la faveur duquel le Département de Jemappes absorbe les régions de Tournai, Charleroi et Thuin.

 A partir de 1815, la Belgique passe sous régime hollandais et les provinces retrouvent leurs anciennes appellations, qu'elles conserveront après l'indépendance. La Constitution de 1831 reconnait d'ailleurs expressément l'existence des provinces comme entités administratives et les dote d'organes représentatifs jouissant d'une certaine autonomie.

 Le XIXème siècle va marquer le Hainaut de l'empreinte de la révolution industrielle. Après le charbon, le Hainaut devient aussi le bassin de la sidérurgie, de la fabrication métallique, de la construction mécanique et électrique, de la chimie, de la faïencerie, de la verrerie et de la confection, sans oublier le secteur carrier de la pierre et de la craie.

 Les voies de communication se développent. Un premier canal reliant Mons à Condé est ouvert à la navigation en 1818, suivi bientôt par le canal Charleroi – Bruxelles et, plus tard, par le Canal du Centre qui achève la liaison entre la Sambre et l'Escaut. La ligne de chemin de fer Mons – Bruxelles est inaugurée en 1841.

De nouvelles villes apparaissent, comme la Louvière, qui n'était qu'un simple hameau de la commune de Saint-Vaast, ou l'arrondissement de Charleroi, qui quadruple sa population entre 1830 et 1919.

 Cette formidable expansion ne modifie pas seulement le paysage. Elle bouleverse également l'ordre établi. L'apparition d'un prolétariat urbain annonce l'émergence du mouvement ouvrier. Pilier de l'industrialisation, le Hainaut devient naturellement l'un des principaux foyer de la contestation sociale. C'est d'ailleurs à Quaregnon, au coeur du Borinage, que le Parti ouvrier belge adopte, en 1894, la célèbre Charte qui balisera sa politique pendant les décennies à venir.

 Au début du XXème siècle, le savoir-faire hainuyer s'exporte aux quatre coins de la planète. Les deux conflits mondiaux vont changer la donne. Dans les années soixante, les charbonnages crachent leurs dernières bouffées de fumée noire, non sans avoir contribué au redressement économique de la Belgique d'après-guerre. Cette fois, de nombreux migrants italiens sont venus prêter main forte aux mineurs hainuyers et liégeois pour gagner la bataille du charbon, parfois au prix de leur vie. La plupart d'entre eux s'installent définitivement chez nous.

L'échiquier institutionnel

 A sa création, en 1830, la Belgique est un État unitaire dont le territoire est divisé en neuf provinces. Le français est la seule langue officielle. Cette question de langue va poser problème jusqu'à remettre en cause l'unité du pays, et donner naissance à un Etat fédéral.

Le mouvement flamand voit le jour dès 1840, des lois linguistiques apparaissent vers 1870, entraînant la création de sociétés de défense wallonnes. En 1912, un Congrès wallon rassemble donne naissance à la première Assemblée wallonne, dont Jules Destrée est le  président, et l'auteur de la « Lettre au roi sur la Séparation de la Wallonie et de la Flandre » (1912).

La question linguistique engendre des lois linguistiques consacrant l’unilinguisme de la Flandre et de la Wallonie. C'est à cette période, aussi, que s'expriment les premières revendications fédéralistes. Un projet d’État fédéral composé de deux régions et d’une ville fédérale, (Bruxelles), est adopté dès 1946. Le pays fera un pas supplémentaire vers la régionalisation en 1962, via une loi délimitant quatre régions linguistiques : la région de langue française, la région de langue néerlandaise, la région de langue allemande et la région bilingue de Bruxelles-Capitale (français-néerlandais).

C'est en 1970 que le paysage institutionnel voit officiellement apparaître  de nouvelles structures entre l’État central et les provinces - la Constitution est modifiée pour y intégrer l’existence de trois communautés culturelles et de trois régions – et, dix ans plus tard, l'affirmation du poids politique de ces nouvelles instances. Des années '80 aux années 2000, les compétences des Régions ne cesseront d'être élargies, restreignant de fait celles des Provinces.

Les Provinces sur la sellette

Depuis la création de la Belgique, les Provinces sont chargées de gérer « tout ce qui est d'intérêt provincial », soit ce qui n'est pas compétence d'un autre niveau de pouvoir. Ce qui donne aux Provinces l'opportunité de jouer à plein leur rôle de pouvoir de proximité, en développant chacune des politiques et initiatives particulières aux attentes des citoyens du territoire qu'elles couvrent.

Mais avec la création des Régions, la tutelle qu'elles exercent sur les pouvoirs locaux et l'extension de leurs compétences, se pose la question du « qu'est-ce qui est encore du domaine provincial ? »

En vertu du Code de la Démocratie locale et de la Décentralisation, les Provinces sont, d'une part, chargées de l’exécution de certaines décisions prises par d’autres pouvoirs et, d'autre part, sont compétentes dans toutes les matières qui relèvent, donc, de l’intérêt provincial.

Pour les missions obligatoires, identiques dans chaque province wallonne, pas de problème. Elles sont clairement déterminées :

-      la tutelle sur les communes pour certaines matières(essentiellement budget et comptes, statut des agents),

-      les candidatures à certaines magistratures,

-      la couverture du déficit des fabriques cathédrales,

-      des établissements chargés du temporel des cultes orthodoxe et islamique, des établissements d’assistance morale laïque,

-      le maintien de l’ordre.

Par contre, les Provinces vont devoir s'inscrire dans un long débat pour maintenir les politiques particulières mises en places et développées de longue date. Et, parfois, les abandonner, aussi.

Midi sonne en Hainaut

L'heure d'une remise en question sonne. Le Hainaut se voit conforté dans ses choix, les 5 pôles de compétences qu'il s'était déterminé se sont vu valider : Enseignement/Formation, Culture/Tourisme, Action sociale, Sports/Santé, Ecodéveloppement territorial.

Mais une réflexion se poursuit sur la place de la Province dans l'émergence des territoires. Le Hainaut y voit l'occasion d'un second souffle et, loin de se replier sur elles-mêmes pour se plonger dans une débat sur son devenir, les Autorités invitent une multitude de partenaires à la table de discussion au travers de rencontres appelées les "Midis de la Province" . Les édiles d'autres niveaux de pouvoir, des juristes, des techniciens, des représentants des universités, des associations ayant l'habitude de collaborer avec les services provinciaux, des citoyens, aussi.

Au menu : quelles sont les compétences à maintenir, à privilégier, à développer? Quelles sont celles à recentrer, modifier, abandonner ?

Ces « Midis de la Province » ont aussi, surtout, mis en exergue la complexité de l'organisation institutionnelle du pays, l'importance de communiquer entre différents niveaux de pouvoir pour instaurer des synergies et en penser les politiques de chacun en complémentarité. Le rôle de la Province dans le développement de la supracommunalité apparaît, aux yeux de beaucoup, comme une évidence. Avec, pour seul objectif, le meilleur bénéfice pour les citoyens.

Les conclusions de toute cette année de rencontres, de débats, de réflexion, ont légitimé la Province dans sa place sur l'échiquier institutionnel. Elles ont aussi nourri le Plan Stratégique et Opérationnel du Hainaut, et lui ont donné l'impulsion nécessaire pour affronter les grands défis contemporains.